Les députés ont adopté le jeudi 2 mars une proposition de loi visant l’instauration d’une majorité numérique à 15 ans. En dessous de cet âge, les parents devront fournir une autorisation d’inscription aux plateformes.
Des parents rassurés mais des enfants sceptiques
A l’initiative du groupe Horizons et apparentés, la proposition a été votée à la quasi-unanimité dès la première lecture ( 82 oui contre 2 non ). L’idée d’une majorité numérique revient donc sur la table après une première évocation en 2018 à l’occasion de la mise à jour de 2 lois : la loi informatique et libertés de 1978 ainsi que la loi sur la protection des données personnelles. Le texte prévoit également de redéfinir le terme réseau social dans le droit français. C’est désormais au Sénat d’examiner le sujet qui est déjà accueilli très chaleureusement par les parents. « Avec les téléphones, on a plus le contrôle sur ce que font les enfants. J’étais tombé par hasard sur le profil Instagram de ma propre fille dans mes recommandations alors que je ne savais même pas qu’elle avait un compte et j’aurais préféré qu’elle m’en parle. » raconte Sébastien, père de 2 enfants âgés de 13 et 11 ans. A l’inverse, les enfants n’apprécient pas l’idée de dépendre d’une autorité parentale : « A mes yeux ça va créer des écarts entre les élèves, au collège, on utilise beaucoup les réseaux pour échanger sur les cours. En plus, le peu d’élèves qui n’a pas de réseaux est un peu moins intégré, donc si la loi passe, tous ceux qui ont des parents un peu stricts seront un peu mis à l’écart et ce serait triste. » craint Ambre, élève de 4ème à Strasbourg.
Un gros coup de pouce pour les associations
De leur côté, les associations de protection de l’enfance se réjouissent aussi du tournant que pourrait apporter cette loi. Le travail de l’association E-Enfance qui œuvre pour le bien-être et la protection numérique des plus jeunes pourrait être grandement facilité. Bien que la juridiction impose un âge minimum de 13 ans pour s’inscrire sur la plupart des réseaux sociaux, 63% des enfants de 8 à 18 ans y sont inscrits, d’après un sondage Audirep commandé par l’association. L’adoption d’un âge minimum pour s’inscrire sur les réseaux sociaux serait donc une aide précieuse pour les intervenants de l’association. «On a beau faire de la prévention pour les parents ou directement aux jeunes dans des classes, si en face, ils ne prennent pas en compte ce qu’on dit, on n’a pas le pouvoir de les en obliger.» explique Nadine, une standardiste de l’association qui opère au 3018. C’est sur ce même numéro que près de 75 appels sont traités par jour. Un nombre qui pourrait descendre avec l’intervention de l’État sur le sujet selon l’opératrice : « C’est sûr que si les parents reprennent la main sur les inscriptions grâce à une loi nationale, les plus jeunes seront moins présents sur ces plateformes. Ce sont eux qui représentent le plus de risques donc, en limitant les risques, on espère faire face à moins de problèmes».
Le texte de loi veut aussi laisser la possibilité aux parents de demander la suspension du compte d’un enfant de moins de 15 ans pour que le pouvoir parental soit total. Si la loi est adoptée, le manquement par un réseau social à ces obligations de vérification de l’âge et du consentement de l’autorité parentale pourrait être puni d’une amende allant jusqu’à 100 000 euros.