La marine brésilienne a coulé ce vendredi 3 février le porte-avions Foch, ex-fleuron de la marine française. Les associations de défense de l’environnement dénoncent « un crime environnemental », tandis que l’épave contient plusieurs centaines de tonnes de déchets hautement toxiques.
Les eaux de l’océan Atlantique abritent désormais un nouveau pensionnaire : une épave de 265 mètres de long sur 51,2 m de large. Le porte-avions Foch, ancienne possession de la marine française pour laquelle il a servi pendant 37 ans se retrouve désormais immergé. Vendu en 2000 contre 88.5 millions de francs, celui que l’on nomme désormais « São Paulo » a été coulé par l’armée du Brésil. Le navire s’est rapidement transformé en poids pour le pays, entre problèmes techniques, incendie en 2005 ou encore modernisation trop coûteuse. Le gouvernement brésilien était déterminé à s’en débarrasser.
Une catastrophe environnementale
Cette décision représente une véritable bombe écologique. Le navire ne contiendrait pas moins de 9,6 tonnes d’amiante hautement cancérigène, mais aussi 644 tonnes de peintures, produits chimiques et autres matières dangereuses. Des quantités alarmantes qui ont été confirmées par le ministre public fédéral du Brésil. Il avait de son côté multiplié les tentatives pour arrêter l’opération, en vain. Ces polluants devraient se déverser rapidement dans les eaux puisque la coque du porte-avions est abimée. Même inquiétude du côté des associations de protection de l’environnement comme Greenpeace ou Robin des Bois qui pointent, elles aussi, du doigt « une violation de trois traités internationaux sur l’environnement ».
Des ressources halieutiques menacées
Mais les plus en colère sont bien les pêcheurs. L’Atlantique est le deuxième océan pour la production mondiale de poisson. Thons, turbos, daurades ou encore crevettes, c’est un large panel d’espèces maritimes qui se retrouvent exposées à cette pollution. Se pose alors un vaste problème pour la consommation mondiale de produits de la mer. L’Organisation des Poissonniers Ecaillers de France ( OPEF ) une menace pour le consommateur : « Souvent quand on achète en supermarché les emballages mentionnent ‘’ pêché en Atlantique ‘’, mais l’Atlantique c’est plus de 100 millions de km². Il y a un véritable problème de traçabilité puisqu’il est alors impossible de savoir si le poisson a vécu proche de la zone contaminée, c’est là que le consommateur s’expose à un aliment dangereux pour la santé ».
Sur les côtes brésiliennes aussi les pêcheurs locaux manifestent leur inquiétude. C’est le cas de Matheus Neves, pêcheur sportif. Il remarque déjà les conséquences du sabordage du paquebot. « L’écosystème est menacé, c’est mon gagne-pain la pêche sur les côtes. En plus de vendre mes prises, j’organise des journées de pêche sportive pour les touristes. C’est une mauvaise nouvelle car les gens ne veulent plus de nos poissons » explique-t-il. L’inquiétude des locaux est grandissante, et à juste titre puisque selon les experts des fonds marins, si les produits dangereux se déversent dans les eaux, ils ne prendraient que quelques jours avant de toucher les zones côtières du pays des palmiers.
Les dessous d’une décision lourde de conséquences : Faute de trouver un port volontaire pour accueillir ce géant des mers, la marine brésilienne s’était lancée dans une opération de transit via un remorqueur néerlandais. Néanmoins la manœuvre a été jugée trop périlleuse et les risques encourus par l’équipage trop grand. L’armée a alors décidé d’abandonner le bateau à 350 kilomètres des côtes brésiliennes. « Face aux risques qu’implique le remorquage et en raison de la détérioration de la coque (…), la seule solution est d’abandonner la coque en la coulant de façon contrôlée », a justifié le ministère brésilien de la Défense dans la nuit dans un communiqué du 3 février.