Avec le début du confinement, les associations craignent une aggravation des violences conjugales. Pour l’instant, difficile de savoir ce qui se passe dans les foyers français. Les magistrats sont, eux aussi, obligés de travailler à distance, ce qui ne facilite pas la protection juridique des victimes. Mais plusieurs associations ont déjà mis en place des mesures préventives.
Être confiné avec un conjoint violent peut vite virer au drame. C’est ce qui s’est passé en Chine, où les divorces, mais surtout les violences conjugales ont nettement augmenté pendant la période de quarantaine. En France, la menace est prise au sérieux par le corps politique. Le ministère de la Justice a pris position en faveur d’un maintien total des numéros d’écoute et des mesures d’éloignements des conjoints violents : “Il est primordial de faire cesser la cohabitation, lorsque celle-ci est dangereuse.” explique la ministre de la Justice, Nicole Belloubet, dans un communiqué de presse.
Pourtant, avec un système juridique qui fonctionne au ralenti, beaucoup d’avocats se questionnent sur l’efficacité de ces mesures. Actuellement, les victimes de violences qui souhaiteraient mettre en place une mesure d’éloignement seront confrontés à des difficultés. Les certificats médicaux, essentiels à un dossier de violences conjugales, ne seront peut-être pas valable par mail. La justice n’a pour l’instant pris aucune décision sur ce sujet. Mais surtout, si une mesure d’éloignement est acceptée, l’agresseur devra briser son confinement pour habiter ailleurs. Pour l’instant, les associations et les avocats spécialisés sont dans un flou juridique. Mais les collectifs de défenses des droits des femmes mettent déjà en place des solutions et des mesures préventives.
Des actions pour protéger les victimes
Si les agresseurs ne peuvent pas être éloignés de leurs foyers par les tribunaux, les associations prennent déjà le relais pour mettre les victimes en sécurité. La Fondation des Femmes a lancé un important appel au don pour pouvoir payer un maximum de nuit d’hôtel à toutes les victimes de violences conjugales. Une solution temporaire, mais qui permet d’offrir quelques jours de repos et de sécurité à des femmes en danger.
Ce n’est pas la seule initiative qui a été mise en place. Marlène Schiappa, la secrétaire d’Etat chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, a lancé dès le début du confinement un plan d’aide pour protéger les victimes, en collaboration avec le numéro d’aide contre les violences faites aux femmes, le 3919.
Les heures de fonctionnement de la plateforme ont été rallongées et des téléphones portables ont été donnés aux écoutantes pour qu’elle puisse continuer à aiguiller les requérantes depuis chez elles. Pourtant, le nombre d’appels a baissé. Le 3919 reçoit actuellement 100 appels par jour, contre 400 d’habitude : “Une baisse du volume d’appels ne signifie probablement pas une baisse des violences conjugales, loin de là ; la crise crée au contraire un terreau propice aux violences” explique Marlène Schiappa dans un communiqué de presse. Les femmes confinées ne peuvent plus appeler le 3919 sans risquer d’être surprise par leurs compagnons, ce qui expliquerait la baisse d’appels.
Sur les réseaux sociaux, les appels à la vigilance se multiplient. Beaucoup de comptes officiels recommandent aux voisins d’appeler immédiatement la police s’ils entendent des coups ou des cris. Un geste qui peut paraître évident, mais qui est d’autant plus important en période de confinement.
Marie Sprauer