Le 1er forum de la paix du XXIème siècle s’est déroulé à Paris du 11 au 13 novembre 2018. Il a rassemblé 84 chefs d’États et de gouvernements ou leurs représentants et veut poser le multilatéralisme comme le garant de la paix. De leur côté, les présidents français et allemand se posent en défenseurs dans l’Union européenne des valeurs communes.
Alors que différents pays dans le monde se replient, une initiative pour soutenir la coopération internationale a émergé. L’idée a été lancée par Emmanuel Macron au cours de l’été 2017, mais le Forum de la Paix de Paris est organisé par un rassemblement d’ONG indépendantes, soutenu par le Quai d’Orsay. Il rassemble de nombreux acteurs politiques mondiaux, des chefs d’Etats et de gouvernements, leurs représentants et des acteurs de la société civile. Sur le long terme, les ONG organisatrices et le président français veulent faire du forum de Paris un rendez-vous annuel en faveur du maintien et de la promotion de la paix.
Projets de gouvernance pour la paix et la coopération
La date pour l’inauguration de l’événement n’a pas été choisie au hasard. La commémoration des 100 ans de la Grande Guerre semblait idéale pour lancer une discussion sur la paix dans le monde. Dimanche 11 novembre, les discours successifs d’Emmanuel Macron, d’Angela Merkel et d’Antonio Guterres, secrétaire général des Nations Unies, ont ouvert les discussions sur des thèmes divers, tels que la sécurité et la paix, les nouvelles technologies et l’environnement. 121 projets de gouvernance portant des réponses aux défis mondiaux devaient être présentés. Parmi les 10 projets retenus, celui d’une plateforme Union africaine/Union européenne pour une coopération entre ces deux entités, ou encore le projet de soutien global des agriculteurs pour améliorer la fertilité des sols, de réduire les coûts ou les besoins en irrigation. La coopération internationale a donc été à l’honneur au cours de ce forum. Les dirigeants français et allemands, dans leur discours d’ouverture, se sont présentés en hérauts du multilatéralisme, notamment face à un Trump isolé et très critique de l’Union européenne.
Les Etats-Unis isolés face à l’Union européenne
Isolé, Trump l’a été au cours de ce forum. Arrivé à Paris en critiquant la volonté d’Emmanuel Macron de construire une « stratégie de défense européenne », Donald Trump a été peu après accusé par le président français de « nationaliste ». Un qualitatif que le locataire de la Maison Blanche n’a pas paru apprécier : dès son retour aux Etats-Unis, il a critiqué à coups de tweets la politique d’Emmanuel Macron, et appelé à « rendre à la France sa grandeur ». Il a par ailleurs boudé la journée d’inauguration et s’est rendu seul dans un cimetière américain à Suresnes, tandis que ses homologues invités se rassemblaient pour ouvrir le forum. Le président français a profité de la position très protectionniste de son homologue américain pour défendre le multilatéralisme et les bienfaits de la construction européenne.
L’UE, la seule entité du genre dans le monde, a été présenté comme un vecteur de paix sur le continent européen, si souvent en guerre et source de guerre lors des siècles précédents. Une attaque aux membres du groupe de Visegrad qui rassemble des Etats d’Europe de l’Est en désaccord avec Bruxelles, et à l’Italie qui veut affirmer son indépendance économique vis-à-vis de la Commission européenne. Le président français assure que même « si l’Europe a manqué de se suicider » ces dernières années, l’heure semble maintenant venue de donner un nouveau souffle à l’Union européenne.
Relents des années 30
Si le Brexit a apporté avec lui un vent de contestation populiste des directives de l’Union européenne (UE) et des « technocrates de Bruxelles », il a aussi permis la prise de position inverse de la part des europhiles. Le débat politique s’est aujourd’hui polarisé à moins d’un an des élections européennes, entre populistes et nationalistes face à europhiles et patriotiques. Le moment de rappeler l’importance de la construction européenne est bien choisi. 100 ans après le conflit impérialiste et nationaliste qu’a été la Première Guerre Mondiale, il faut se souvenir que « la paix que nous avons aujourd’hui, nous parait parfois trop évidente », déclare Angela Merkel lors du forum de la Paix. La chancelière se dit animée par une certaine : « inquiétude que l’on soit de nouveau en présence d’un nationalisme à œillères, qu’on recommence à agir comme si on pouvait purement et simplement ignorer nos engagements réciproques ». Un appel donc à ne pas répéter les erreurs du passé, dans un contexte où l’on compare souvent notre époque à celle des années 30.
Ce forum de la Paix s’est clôturé le 13 novembre sur des promesses de la part de certains chefs d’Etat, dont le président français et le premier ministre canadien, d’œuvrer pour la liberté d’expression dans leur pays.
Maud Lénée-Corrèze