Un arrêté gouvernemental proscrit désormais aux magasins spécialisés, la vente des fleurs et de feuilles de cannabidiol en France. Plusieurs acteurs du secteur ont saisi le Conseil d’Etat vendredi dernier pour contester cette décision.
Alors que de plus en plus de pays européens envisagent de légaliser le cannabis, la France fait machine arrière. Le 31 décembre dernier, un décret ministériel annonçait l’interdiction pure et simple de la vente et de la consommation de feuilles et de fleurs de CBD. Cette molécule appelée cannabidiol, présente dans la plante de chanvre, est beaucoup utilisée dans le traitement des convulsions, de l’inflammation et des états anxieux. Contrairement au THC, le CBD n’est pas addictif et n’a pas d’effets psychoactifs. Pour autant, sa combustion reste mauvaise pour la santé. La plus haute juridiction administrative a donc été saisie par divers acteurs de la filière, souhaitant obtenir la suspension en urgence de l’arrêté pris par le gouvernement.
Une menace pour de nombreuses entreprises
Pour la majorité des magasins spécialisés, cette interdiction signe la mort de leur établissement. Fin 2021, on comptait plus de 2000 boutiques de CBD en France dont 30 dans le Bas-Rhin. Selon Stéphane Fischer, gérant de La Casa Verde à Strasbourg, la fleur de CBD représente 60 à 70% du chiffre d’affaires pour de nombreuse boutiques. Pour autant, il reste confiant face à cet arrêté, « Le droit européen dit qu’on a toujours le droit de le faire et la loi européenne prime toujours sur le droit français donc pour moi ça ne change pas grand-chose ». Même si le but premier de cette décision gouvernementale est de protéger les consommateurs, Stéphane Fischer voit les choses différemment. « À mon avis, ce sont les labos, et les tabacs qui veulent le monopole du marché du CBD», attaque-t-il.
« On ne sait pas sur quel pied danser »
Bien que ce nouvel arrêté inquiète de nombreux professionnels de la filière, il sème aussi la confusion. Emeric Millet, 23 ans, gérant de Deli Hemp CBD à Strasbourg, reste plutôt perplexe, « On peut vendre des résines, ce qui ressemble grossièrement à de la résine de cannabis. Mais je n’ai pas le droit de vendre de fleurs, car ça ressemble au cannabis », constate-t-il. Pour autant, le commerçant, reste plutôt optimiste. Dans sa boutique, la vente de fleur représente que 30% du chiffre d’affaires. « On est une jeune boutique, on a encore une clientèle plutôt âgée », explique-t-il. Emeric Millet essaye de diversifier au maximum les produits qu’il propose : huiles, cosmétiques ou encore infusions. Pour le jeune gérant, « la fleur ne fait pas tout.»
Des stocks à gérer
Dans l’attente de la décision du Conseil d’État, Emeric Millet, n’a pas eu d’autres choix que de déstocker, « On doit renvoyer notre stock dans notre siège à Paris et attendre », explique-t-il. Jusqu’au 15 janvier dernier, la possession et la vente de fleurs de CBD étaient encore autorisées. Par conséquent, les grosses entreprises ont pu écouler les stocks, sachant qu’une fleur se périme au bout de 6 mois. D’autres commerçants ont, eux, décidé de jouer la carte de la discrétion en continuant de vendre des fleurs, mais sans les mettre en avant dans leur vitrine.