La célèbre ONG Amnesty International a lancé la campagne « Silence on arme », afin de mettre fin à l’omerta des ventes d’armes. Le 6 février dernier, un nouveau cargo saoudien avait fait escale à Cherbourg pour récupérer les armements français, créant ainsi l’indignation de plusieurs associations.
Face au référé déposé contre la venue du cargo saoudien Bahri Yanbu, le 6 février dernier, le tribunal administratif de Paris a décidé de le rejeter le 11 février. L’association Action sécurité éthique républicaine (ASER) avait demandé «l’annulation des autorisations douanières de sortie et de transit de matériel de guerre (…) du cargo saoudien Bahri Yanbu», qui a fait escale jeudi à Cherbourg et «à destination de l’Arabie Saoudite».
Le cargo est soupçonné par 19 ONG et partis politiques de convoyer des armes pour l’Arabie Saoudite, alors en guerre contre le Yémen. Mais selon la juge du tribunal administratif, l’association requérante « n’apporte aucun élément suffisamment précis et circonstancier pour justifier» de l’existence « des autorisations de sortie qu’elle dénonce. » L’arrivée très contestée par certaine ONG du cargo saoudien a notamment relancé la campagne « Silence on arme » de l’ONG Amnesty International.
En matière de vente d’armes, c’est l’omerta
D’après le rapport de l’Institut de recherche sur la paix internationale de Stockholm (Sipri) publié le 9 décembre 2019, les ventes d’armes ont augmenté de 4,6% dans le monde en 2018. La France se place à la quatrième position de pays exportateurs d’armes et détient 5,5% de ce marché mondial. Pourtant, selon les résultats d’un sondage Harris Interactive réalisé en octobre 2018, 83 % des Français pensent que la France devrait prendre plus d’initiatives pour renforcer le contrôle du commerce des armes et que ce commerce manque de transparence. Mais seulement 13 % s’estiment bien informés sur le sujet. « Il y a donc un énorme travail de pédagogie à effectuer », estime Nawale Elkihel, assistante chargée de campagne à Amnesty. Du fait de ce silence, l’ONG exige du Président français « transparence et contrôle sur les ventes d’armes de la France. » Cependant, l’association déclare qu’« Emmanuel Macron a déjà pris la parole plusieurs fois sur le sujet. Il a notamment déclaré qu’il avait « demandé à l’Arabie saoudite de ne pas utiliser d’armes françaises dans le conflit au Yémen ». Cela ne représente en rien un engagement, c’est insuffisant, mais cela montre tout de même que les messages de la société civile commencent à être entendus. » Un combat qui n’aurait pas eu lieu sans les recherches et le rapport sur l’Egypte d’Amnesty International, où « [ils se sont] rendu compte que la France ne respectait visiblement pas ses engagements internationaux. »
En 2019, plusieurs médias, dont Disclose avaient révélé un rapport classé secret défense sur le détail des équipements conçus en France pour les Emirats arabes unis et l’Arabie saoudite.
Un silence qui coûte des vies
« Entre mars 2016 et décembre 2018, 35 civils sont morts au cours de 52 bombardements localisés dans le champ d’action de ces canons », indique Disclose, qui s’appuie sur les données de l’ONG Acled. Parmi les engins militaires, des chars français ont contribué à la mort de 55 civils lors de la bataille d’Al-Hodeïda en 2018.
Pourtant, en avril 2013 la France, et les Nations unies ont adopté le Traité sur le commerce des armes classiques(TCA). Ainsi, les règles mises en place dans cette politique visent notamment à arrêter la circulation d’armes et leurs ventes à destination de pays en guerre. Les principaux pays exportateurs d’armes qui ont ratifié ce traité sont l’Allemagne, l’Espagne, la France, l’Italie et le Royaume-Uni. La France joue donc les mauvais élèves et semble assumer son rôle de cancre.