L’année 2020 s’annonce comme un nouveau tournant dans le paysage audiovisuel. Le 31 mars prochain, Disney lancera sa plateforme de service de vidéo à la demande (SVOD) Disney+ en France. Celle-ci viendra côtoyer les Netflix, Amazon Prime, OCS et CanalPlay déjà bien implantés chez les Français. Avec des budgets de plus en plus colossaux ces plateformes et notamment Netflix peuvent se permettre de financer des œuvres pouvant rivaliser avec le cinéma. Le 27 novembre dernier sortait The Irishman, un film qui aura fait couler beaucoup d'encre pour plusieurs raisons : son réalisateur, Martin Scorsese, son casting 5 étoiles constitué notamment de Robert De Niro, Al Pacino, Joe Pesci ou bien Harvey Keitel et enfin son budget avoisinant les 150 millions de dollars. Jusqu’ici rien d’anormal. Hormis peut-être le fait que ce film n’est sorti dans aucun cinéma en France et uniquement dans quelques salles américaines. La raison est simple, il s’agit d’un film estampillé Netflix. La plateforme SVOD a financé le projet le plus coûteux de son histoire. Une production digne des plus grands studios de l’industrie cinématographique qui a fait grincer des dents certains comme Hollywood qui y voient ici un danger pour l’industrie. La plateforme n’en est d’ailleurs pas à son coup d’essai après avoir acheté des œuvres comme Okja de Bong Joon-Ho, Roma d’Alfonso Cuaron, The Ballad of Buster Scruggs des frères Cohen. Si Netflix peut se permettre de produire ou de racheter de grosses productions telles que celles citées ci-dessus, il ne tardera pas de voir Jeff Bezos en faire de même pour sa plateforme Prime Video ou The Walt Disney company avec Disney+. Des concurrents qui eux aussi voudront s’imposer sur le marché dans les prochaines années pour défier Netflix actuellement grand leader de la SVOD. Un impact considérable sur le cinéma? Non, l’essor de la SVOD ne représente pas un danger pour l’industrie du cinéma et ne le sera peut-être même jamais. En revanche il l’est beaucoup pour la télévision. Le Centre National du Cinéma et de l’image animée a indiqué dans son dernier Observatoire de 2019 que Netflix était désormais la 5ème chaîne de France se plaçant devant C8, TMC, BFMTV, W9 ou France 5 avec en moyenne entre 3 et 4 millions de spectateurs par jour. Le groupe Ernst & Young Global Limited a également démontré que la fréquentation du cinéma et la consommation de contenu SVOD n’était pas liée, une personne qui se rend fréquemment au cinéma consommera aussi beaucoup de SVOD et à l’inverse une personne qui va très peu au cinéma ne sera pas plus intéressée par les films d’une plateforme. L’arrivée du streaming a apporté une nouvelle manière de regarder des films, obligeant des chaînes comme Canal + à se positionner sur cette tendance avec CanalPlay mais qui peine à convaincre autant de public que ses concurrents. OCS a fait de même en liant des partenariats avec les chaînes américaines HBO, AMC, Sony Pictures afin de renforcer son catalogue de contenu exclusif. Les prévisions donnent 10 millions d’abonnés à la SVOD en France en 2023 selon le Digital TV Research. Un chiffre qui a de quoi inquiéter les chaînes de télévisions classiques dont les audiences ne cessent de diminuer année après année. Une fréquentation en hausse mais pour quels films? L’invention des frères Lumière est loin d’être en danger. En effet la fréquentation des cinémas en France est même en hausse sur l’année 2019 (environ 5,8% de plus que l’année 2018). Cependant il est possible de nuancer en se demandant la cause de cette augmentation qui n’est pas uniquement nationale mais mondiale. D’un point de vue démographique, les jeunes de moins de 25 ans vont plus occasionnellement au cinéma que dans les années 90. Ils viennent en revanche en masse pour les films dits «franchisés» c’est-à-dire des films liés à Marvel, DC Comics, Star Wars, James Bond, Fast & Furious, Pirates des Caraïbes… La communication dans les différents supports médias et publicitaires est omniprésente au point de créer un événement autour du film. Plus de monde va se déplacer pour un film d’une franchise donc la fréquentation moyenne va augmenter. Sources : CNC, EY, Digital TV Search Crédit photo en Une : Théo Hervieux Théo Hervieux