Le Théâtre National de Strasbourg a présenté sa nouvelle saison, vendredi soir à 19h. Stanislas Nordey, directeur du TNS, s’est adressé aux amateurs de théâtre, en direct sur les réseaux sociaux.
« Le bar du Théâtre National de Strasbourg a rouvert ! Bien évidemment, dans le respect de règles sanitaires strictes », déclare Stanislas Nordey, tout sourire, en direct du TNS. Reprenant les mots du président Macron, il a dévoilé l’été « culturel et apprenant » à venir, avec la mise en place d’ateliers, voire de résidence d’écriture. « De manière militante, je vais vous demander de venir encore plus nombreux au TNS. Il est très important que la communauté théâtrale se reconstitue. », lance-t-il avec solennité. La billetterie du Théâtre National de Strasbourg ouvrira le premier juillet.
Le TNS revient
Pour cette riche et nouvelle saison, Stanislas Nordey précise que neuf des créations proposées cette année ont été préparées directement sur place. « C’est énorme, on n’a jamais fait ça », souligne-t-il. L’équipe du TNS est venue en aide aux pièces « en péril », en proposant aux artistes de terminer le montage de leurs spectacles sur place. « Nous prenons des risques avec les artistes, mais j’ai confiance dans les équipes, je sais que la qualité est là. », assure Stanislas Nordey. Le public aussi choisira de prendre le risque de venir voir des pièces dont les thèmes sortent des sentiers battus. La famille et ses secrets, le rapport de l’homme à la mort, la jeunesse et ses espérances jalonnent la saison. Les textes sont forts, les mots parfois abrupts, mais touchants.
Sur la couverture du programme 2020/2021, le visage de l’écrivaine française Marie Ndiaye apparaît. « Marie Ndiaye est notre porte-étendard », déclare le directeur pour justifier son choix. Elle offre surtout deux pièces au public cette année : « Berlin mon garçon » et « Les serpents ».
Programme
La saison s’ouvre en septembre avec la pièce « Aria da Capo ». Écrite par un trio d’auteurs : Guilain Desenclos, Adèle Joulin et Areski Moreira, elle raconte l’histoire d’un quatuor de jeunes musiciens âgés de 15 à 18 ans, jouant leur propre rôle d’apprentis musiciens, au Conservatoire d’Orléans et ailleurs. Plusieurs questions seront abordées : « Qu’est-ce que la vie d’un jeune musicien en 2020? Comment vit-on ce métier dans le monde d’aujourd’hui? »… « Aria da Capo » nous plonge dans le quotidien de cette nouvelle génération de jeunes. Selon Stanislas Nordey, ce spectacle nous fera « réfléchir, et rêver ».
Cette nouvelle saison au Théâtre National de Strasbourg réserve une place majeure aux auteur(e)s contemporains. Pourtant et curieusement, de grands classiques sont attendus avec plusieurs pièces écrites par Jean Racine. Stanislas Nordey rappelle ici son envie de « dose homéopathique de classique » dans le contemporain. Il voit les pièces de Racine comme « un fil rouge, un fil conducteur ». À l’affiche cette année, « Mithridate », une pièce écrite en 1672, qui met en lumière l’opposition de l’Orient face à l’Occident. La pièce s’inspire de Mithridate VI, souverain jusqu’en 63 av. J.-C. du royaume du Pont (l’actuelle Turquie, la Crimée et de nombreuses régions au bord de la mer Noire). Mithridate fait figure de résistant : l’homme a voulu s’immuniser au poison en en buvant chaque jour quelques gouttes. Le but était d’habituer son organisme, pour survivre le jour où on tenterait de l’empoisonner. Stanislas Nordey jouera Mithridate, premier rôle de la pièce.
L’auteur et metteur en scène François Gremaud présente sa pièce au mois de décembre. « Phèdre! » (à lire « Phèdre point d’exclamation ») est l’adaptation de la célèbre pièce de Racine. L’équipe du TNS l’a découverte au festival d’Avignon l’an dernier. « On l’a vu et on a eu le coup de foudre », explique Stanislas Nordey. Autre pièce inspirée de l’oeuvre de Racine : « Andromaque à l’infini ». Il s’agit d’une coproduction entre le TNS et Gwenaël Morin, metteur en scène et directeur du Théâtre du Point du Jour, à Lyon. Ce spectacle fera partie de « l’Autre saison » et sera produit au Théâtre de Hautepierre. Stanislas Nordey précise que les jeunes acteurs sont « issus de la diversité et font partie du programme « 1er Acte »».
Les femmes à l’honneur
Les deux spectacles mis en scène par Stanislas Nordey ont été écrits par des auteures. Le directeur annonce que le programme de l’année prochaine sera lui aussi fortement représenté par les femmes. « Je ne monterai plus que des textes écrits par des autrices. On est très en retard quant à la parité hommes/femmes au théâtre. Il y a trop peu de présence féminine. », déplore-t-il. Le TNS veut assumer « une forme de volontarisme » et est prêt à montrer l’exemple. Première étape : la saison 2020/2021 présentera six pièces écrites par des femmes, sur un total de vingt pièces offertes au public.
Marie Ndiaye a écrit « Les serpents », mise en scène par Jacques Vincey. Selon Stanislas Nordey, elle livre ici « l’un de ses plus beaux textes ». « Les serpents » évoque la mort d’un enfant et la déflagration qu’elle produit au sein du couple. La pièce est portée par trois actrices de trois générations différentes.
De la poésie
Stanislas Nordey a choisi des textes aux écritures fortes, aux sujets puissants. Il met en scène « Berlin mon garçon », la seconde pièce de la saison écrite par Marie Ndiaye. Les répétitions avaient débuté trois jours avant le confinement. Les comédiens ont été coupés dans leur élan, mais ont hâte de retrouver les planches et de redémarrer les répétitions. « Berlin mon garçon » est l’histoire du départ d’un jeune homme pour le Djihad. La pièce met en scène un couple de parents face à la disparition brutale et inexpliquée de leur enfant. Assurément une pièce dont on ne sortira pas indemne.
Des grands noms
L’actrice Marina Hands jouera en mars 2021 aux côtés d’Audrey Bonnet dans « Soeurs », une création de Pascal Rambert. Audrey Bonnet et Pascal Rambert sont tous deux artistes associées au TNS. « Soeurs » conte l’histoire de deux femmes réunies par un événement tragique. Pourtant sœurs, les deux femmes ne portent pas le même regard sur leur enfance et se trouvent dans la difficulté d’exprimer leur amour pour l’autre. Autre grand auteur convié sur la scène du TNS : Peter Handke, prix Nobel de littérature, avec « Les Innocents, Moi et l’Inconnue au bord de la route départementale » mis en scène par Alain Françon. On l’aura compris, la programmation du TNS s’approche au plus près des drames de la vie tout en préservant une petite part de poésie. Christiane Taubira sera également au TNS à l’automne 2020. Stanislas Nordey l’a contactée pour lui proposer de participer à une soirée d’échanges autour des thèmes actuels, du racisme, de la mort de George Floyd. “Ce sera l’occasion pour nous de nous interroger plus largement” souligne le directeur du Théâtre National de Strasbourg. La soirée mêlera débats et poésie.
Clémentine Voinchet
Informations pratiques: Ouverture de la billetterie mercredi 1er juillet 2020 à 11h, entrée côté République.
Les réservations seront possibles sur le site internet du TNS.
Une permanence téléphonique est assurée au 03 88 24 88 03
Photos: Jean-Louis Fernandez